En France, un tiers des étudiantes sont touchées par la précarité menstruelle
Avec l’inflation importante sur les produits de première nécessité, les protections périodiques et les produits d’hygiène ont vu leurs prix augmenter. Une difficulté face à laquelle les étudiantes, déjà dans une situation de précarité, ont du mal à faire face.
À l’approche de la journée internationale de la fille du 11 octobre qui mobilise de nombreuses associations féministes, le sujet de la précarité menstruelle fait son retour.
Pour l’association Règles élémentaires, “il est nécessaire, dès à présent, de mettre en place une solution globale et radicale pour que les règles ne soient plus synonymes de discriminations.” Les étudiantes sont nombreuses à être en difficulté financière. Selon l’association, elles ont donc besoin d’une attention particulière sur ces produits d’hygiène de première nécessité.
D’après la définition donnée par le Fonds des nations unies pour la population, il s’agit de la difficulté à se payer des protections hygiéniques à cause de faibles revenus. Cela comprend également les médicaments anti-douleurs, les sous-vêtements de rechange, l’accès à l’eau et aux installations sanitaires. Toutes les choses qui permettent aux femmes de pouvoir gérer leurs menstruations dans de bonnes conditions.
L’État, premier acteur dans la lutte
Depuis quelques années, la préoccupation des conditions menstruelles est arrivée dans le débat politique. La précarité menstruelle constitue un enjeu important puisqu’elle est considérée comme une question de santé publique par plus de trois quarts des Français.
Pour lutter contre le prix élevé des protections menstruelles et leur augmentation, l’État a limité les taxes. Depuis le 1er janvier 2016, le taux de TVA sur les produits d’hygiène menstruelle est de 5,5 %, contre 20 % auparavant.
L’État a également débloqué des fonds en 2021. Ils ont permis de mettre à disposition des protections hygiéniques gratuites dans les campus universitaires de certaines régions. Une proposition incitative, qui a aidé au développement des distributeurs de protections hygiéniques.
En 2023, nouvelle avancée. Sur le plateau de C’ à vous, la première ministre Elisabeth Borne a dévoilé que le gouvernement allait “mettre en place un remboursement, par la Sécurité sociale, des protections périodiques réutilisables […] pour toutes les jeunes femmes de moins de 25 ans.”
Mais pour les associations, ce n’est pas suffisant. Leur volonté : que le gouvernement suive les solutions proposées dans d’autres pays d’Europe. En Écosse, les protections périodiques sont disponibles gratuitement pour toutes les femmes depuis août 2022. Avec ce genre de proposition, la précarité menstruelle a reculé dans le pays. En une année, les résultats se sont fait sentir puisque désormais neuf femmes sur dix déclarent avoir accès à suffisamment de protections pour répondre à leurs besoins.
Des initiatives étudiantes essentielles
Afin de répondre à la demande des jeunes en situation précaire, des initiatives étudiantes se mettent en place. À Angers, trois étudiantes d’un DUT génie biologique ont décidé de créer Règle on ça. “Tout est parti d’un travail scolaire sur la précarité menstruelle. Face aux résultats alarmants, les filles ont décidé de lutter à leur échelle”, détaille Ange Roze, ancienne trésorière de l’association.
Peu à peu, ce qui était un simple travail dans le cadre de leurs études devient un véritable projet ambitieux. L’effectif passe en une année de trois à trente personnes, et les actions se multiplient. Ange et son équipe ont “équipé l'IUT d’Angers et la bibliothèque universitaire, avant de se consacrer au campus Belle-Beille de l’université.”
L’objectif : collecter, mettre à disposition, et faire de la prévention. “On voulait “dé-taboutiser” le sujet des menstruations, tout en garantissant un accès libre et égal aux protections”, continue Ange. Le but des distributeurs, que tout le monde puisse y avoir accès facilement. “On a placé les distributeurs dans des lieux mixtes, pour les personnes transgenres notamment, et dans des endroits cachés, pour celles et ceux pour qui le sujet est encore tabou”.
Mais pour l’étudiante angevine, le chemin est encore long. “Il faut continuer et installer ce genre de distributeurs dans toutes les écoles et universités, mais pas seulement. Il faudrait que les protections soient accessibles pour toutes et tous gratuitement dans les lieux publics”. Un appel lancé à la métropole angevine, mais également au gouvernement français.
Les associations se mobilisent
Les associations estiment que les actions de l’État ne sont pas suffisantes. Elles continuent donc à proposer des mouvements et des actions afin d’aider les personnes dans le besoin.
Les produits d’hygiène intime sont récoltés lors de dons par des associations. Elles acceptent les produits réutilisables comme les culottes menstruelles ou les cup. ©Règles élémentaires
La précarité menstruelle touche près d’une femme sur dix selon Plan international. En France, elles sont 4 millions à être dans cette situation. Un chiffre qui a doublé depuis 2021. Bien souvent, ce n’est pas la seule situation précaire dans laquelle elles sont. La précarité menstruelle vient s’ajouter à une précarité économique, alimentaire, ou encore de logement.
Selon un budget établi par le gouvernement français et l’association Règles élémentaires, cela représente entre 8 000 € et 23 000 € au cours d’une vie. Une somme que de nombreuses femmes n’arrivent pas à couvrir, notamment avec l’inflation.
13% d’étudiantes précaires
La population la plus touchée par cette précarité menstruelle reste celle des étudiantes.
Un tiers d’entre elles, âgées de 18 à 24 ans, sont dans cette situation et estiment avoir besoin d’une aide pour se procurer suffisamment de protections menstruelles.
*Photos par ©Règle on ça