Pourquoi les jeunes se marient-ils en 2023 ?

Outre l’emménagement sous le même toit ou l’attente d’un heureux événement, l’une des preuves d’amour les plus significatives demeure le mariage. Toutefois, bien que toujours en vogue, cette institution semble en déclin depuis un certain nombre d’années, à commencer chez les jeunes. De ce fait, il devient légitime de se demander ce que ces derniers cherchent dans le mariage lorsqu’il leur arrive encore de s’unir par ses liens sacrés.

Pourquoi les jeunes se marient-ils en 2023 ?
Alexandre et Claire-Marie se sont unis par les liens du mariage en août 2020. (crédit : Frédéric Ayroulet)

Autre temps, autres mœurs, comme on dit. Le dicton se vérifie dans les familles françaises à bien des égards, y compris en termes matrimoniaux. Le nombre d’unions répertoriées chaque année a chuté de moitié depuis les années 1970 selon l’Insee. Si 244 000 couples se sont unis en 2022, un record en 10 ans, ce boom s’explique largement par le report des cérémonies prévues avant la biennale épidémique de 2020-2021. De plus, l’âge moyen primo-nuptial (tous genres confondus) n’en finit pas de remonter depuis 1973, avec une hausse de 9 ans de part et d’autre. Les ménages se recomposent, se réduisent en taille et paraissent rechigner davantage à donner la vie.

 

Si ces chiffres semblent d’abord refléter un réel désamour pour le mariage, celui-ci n’a pas pour autant été éradiqué et continue de susciter des passions malgré la tendance baissière. Ces quatre couples ont entre 23 et 25 ans et sont déjà fiancés, mariés ou pacsés. De quoi tordre le cou aux statistiques.

 

Pierre et Léa : c’est pour bientôt

 

À 24 et 25 ans et ensemble depuis le lycée, Pierre et Léa sont fiancés depuis l’été, et comptent bien se dire oui à l’horizon 2025. Eux deux envisageaient le mariage dans un coin de leur tête, entourés séparément par des mariages heureux et solides : « Mes parents sont toujours mariés, ils sont un exemple pour moi.  », confie Léa.

 

Toutefois, Pierre a préféré attendre à sa sortie d’études le moment opportun pour faire sa demande : « J’ai toujours eu l’idée que je me marierai un jour, avoue-t-il. Il y a des étapes en grandissant dans la vie. Avant, pour moi, ce n’était pas d’actualité. Non que je ne considérais pas ça bien, ça ne collait juste pas aux moments qu’on vivait. » Passé l’impératif estudiantin, le sujet, quant à lui, est venu sur la table naturellement de leur propre aveu, sans en avoir jamais réellement discuté auparavant, sinon en plaisantant.

 

Le couple reste campé sur la même longueur d’onde concernant leur union future, entre atavisme et conviction religieuse, et se donne le temps nécessaire à l’accomplissement de ce qu’ils souhaitent profondément.

 Amélie et Tom se tenant la main lors de leur union en juin 2023. (crédit : Charlotte Clain)

Tom et Amélie : fraîchement époux

 

On peut difficilement faire plus récent : le prochain tandem s’est marié l’été dernier, en juin. Amélie, 24 ans, et Tom, 23 ans, sont ensemble depuis six ans. Tom semblait décidé à épouser Amélie : « À force de vivre avec la personne qu’on aime, ça m’apparaissait l’étape normale, dit l’électricien. Je ne me voyais pas ne pas me marier à Amélie, ne pas unir nos noms, unir nos familles. »

 

Pourtant, la principale intéressée refrénait cette idée, au vu de leur jeunesse et de sa peur de se voir enfermée dans sa relation. Jusqu’à un soir : « On en a parlé tous les deux, j’ai dit à Tom ma peur du mariage, raconte Amélie. Tom m’a simplement dit que je faisais comme bon me semblait de cette notion, qu’il n’y avait rien de dramatique à se séparer demain. [...] Ça a été un très fort déclic. »

 

Aujourd’hui, quand ils parlent mariage autour d’eux, ils constatent une baisse, ou du moins un report de cette décision dans le parcours de vie : « On a l’impression parfois d’être, non pas des imposteurs, mais des bébés », précise Tom. Et Amélie de renchérir : « ‘Mariage pluvieux, mariage heureux’, en fait, ce n’est pas ‘pluvieux’ rapport à la pluie, mais ‘plus vieux’ rapport à l’âge. »

 

Alexandre et Claire-Marie : noces de froment

 

Ils ont 24 ans tous deux, et sont déjà mariés depuis trois ans. Alexandre et Claire-Marie ont « bénéficié » du vide laissé par les reports de cérémonies entre les deux confinements, en août 2020, pour ce « sacrement ». Car les époux placent une dimension supplémentaire à leur union, celle de la spiritualité.

 

Catholiques pratiquants, le mariage était un sujet réfléchi pour l’un comme pour l’autre, malgré des parcours de vie et des cellules familiales différents. Claire-Marie « a reçu une éducation religieuse que moi, j’ai reçue plus tard », souligne Alexandre, dont la parentèle est d’ailleurs moins étendue que chez sa femme.

 

Toujours est-il que le mariage, et surtout religieux, continue d’être fort de signification pour eux, comme une étape : « Je pense que la dimension spirituelle est mal comprise aujourd’hui, rétorque l’alternant. Ce n’est pas une contrainte qui vient nous dicter des règles, mais nous qui adhérons librement à ce chemin. » Alexandre accepte néanmoins de faire figure « d’extraterrestres », dans une France où se marier jeune et religieusement ne constitue plus la norme, loin s’en faut.

 

Alexandre et Angéline : unis par les liens... du Pacs

 

Enfin, les derniers tourtereaux ont opté pour le Pacs comme gage de leur amour. Angéline a 24 ans, Alexandre, 25. L’année dernière, après quatre ans de vie commune, ils se sont finalement accordés pour contracter cette alternative au mariage : « Il y a eu un tournant dans notre vie à tous les deux, confie Angéline. C’est à partir du moment où on s’est installés à Lille qu’on a commencé à discuter de tout ça, de comment on voyait l’avenir nous deux en plus du départ. »

 

À l’instar de Pierre et Léa, eux aussi ont bâti une vision du mariage eu égard à leur situation familiale. Si Angéline avoue « cette vision un peu idéalisée » de l’union de ses parents à 25 ans, Alexandre confesse se laisser porter, même s’il estime avoir « les mêmes jalons » que sa moitié. Le Pacs a pour eux cet avantage d’accélérer les démarches par rapport au mariage - ils ont mis moins d’un an à le contracter. À cela s’ajoute un moindre coût, ce qui explique en partie également, toujours pour eux, le recul de l’âge au premier mariage, avec « la place prépondérante que les gens accordent à leurs études, à leur carrière, analyse Angéline. Le mariage s’en voit reculé. [...] Peut-être que les gens attendent plus avant de se marier, histoire d’être sûrs. »

 

Il n’empêche qu’ils n’excluent pas de se marier un jour, pour exaucer ce « rêve de petite fille » dont Angéline fait part : « C’est comme si on remplaçait les fiançailles par le Pacs. Le mariage sera la concrétisation de ce point de départ. »