Tom, victime de harcèlement scolaire : « J’ai accepté le harcèlement avec résignation »
Tom* a aujourd’hui 24 ans. Pour la première fois, il accepte de raconter son passé en tant que victime de harcèlement scolaire. Durant toute sa scolarité secondaire, le jeune homme a vécu un calvaire quotidien. Il livre ici ses années difficiles. Interview.
A quel moment le harcèlement a-t-il commencé ? A-t-il évolué avec le temps ?
En 6e, j’ai d’abord été victime de moqueries de la part de certains élèves pendant quelques mois. Puis le harcèlement est devenu physique cette même année, avec des coups, des pincements ou des bousculades en classe. Cela s’est intensifié en 5e et surtout en 4e, qui a été l’année la pire. Le harcèlement était à la fois verbal avec les moqueries toujours présentes, mais aussi physique avec des coups plus fréquents et violents.
Comment avez-vous réagi face à cette situation ?
J’ai eu une réaction passive et j’acceptais ce statut de victime, avec une forme de résignation. C’était comme si j’avais un blocage mental qui m’empêchait de me défendre. Je n’ai pas cherché à me défendre, sauf quelques rares excès de violence que je regrette.
L’administration ou le corps enseignant a t-il réagi à votre harcèlement ?
Je ne pense pas que l’administration en soit vraiment au courant. Un professeur s’est inquiété brièvement après m’avoir posé des questions, mais il n’y a pas eu d’autre intervention. Ils sont restés passifs. Peut-être parce que je ne leur en ai pas vraiment parlé, par peur des conséquences.
« J’ai eu une réaction passive et j’acceptais ce statut de victime, avec une forme de résignation. »
Face à ce manque de réaction, quelle était votre échappatoire ?
Les jeux vidéos. Rentrer chez moi et jouer me permettait littéralement de m’évader mentalement du harcèlement. C’était vital pour moi, plus qu’un soutien psychologique. Cela me sauvait et me donnait la force d’affronter le lendemain au collège.
Tout cela a commencé à s’estomper en troisième ?
Oui, ça peut paraitre paradoxal, mais le fait d’être élu délégué malgré les moqueries initiales a contribué à réduire le harcèlement en 3e. Certains ont d’abord voté pour moi par moquerie, puis ont continué, car je prenais le jeu au sérieux. Cette responsabilité m’a permis de m’affirmer.
Que diriez-vous à des personnes victimes de harcèlement aujourd’hui ?
Je leur dirais de ne pas hésiter à briser le silence, d’en parler à des adultes de confiance.
Et pour les professeurs et les parents ?
Les professeurs doivent être attentifs à des signes tels que l’isolement, le repli sur soi ou des changements de comportement. Les parents aussi : refus d’aller à l’école, humeur triste…
Avez-vous revu un harceleur après la période du collège ?
Oui, j’ai recroisé une ancienne harceleuse au lycée. C’était très étrange et gênant au début, mais elle s’est excusée pour son comportement passé. Nous avons pu avoir une discussion constructive, et je ne lui en veux plus aujourd’hui.
En tant que victime, que pensez-vous de la lettre de l’académie de Versailles à certains parents ?
Si mes parents avaient reçu une telle lettre suite à mon harcèlement, je l’aurais très mal pris. Je considère ce courrier comme aberrant et je me réjouis que l’Éducation nationale ait réagi pour régler ce problème inacceptable aujourd’hui. Il est rassurant que l’institution condamne ce type de mentalité vis-à-vis du harcèlement scolaire.
Qui contacter en cas de harcèlement scolaire ? Deux numéros verts à disposition :
Des associations peuvent être également contactées dans un cadre de harcèlement scolaire. En voici quelques-unes : Association spécifique aux Pays de la Loire : Site de l’éducation nationale s’engageant contre le harcèlement scolaire : |
* Prénom modifié